Interview de Carole Rigaut, directrice de l’espace d’art Halle Nord à Genève

Interview de Carole Rigaut, directrice de l’espace d’art Halle Nord à Genève

De temps en temps, il est bon de faire un pas de côté, alors je suis allée voir Carole Rigaut, directrice de l’espace d’art Halle Nord. Femme passionnée d’art, dénicheuse de talent, une force tranquille qui au fil du temps a exposé des centaines d’artistes installé.e.s à Genève. Halle Nord, sous son impulsion, est devenu un lieu incontournable de la scène artistique genevoise. Il fallait bien que je l’entende nous parler de ce lieu, d’art, des artistes, des musées en général et de l’Ariana en particulier. Quel plaisir de partager ici nos échanges. Bonne lecture !

1. Portrait de Carol Rigaut
  1. En préambule de nos discussions, pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre parcours ?

J’ai d’abord commencé par une formation universitaire, puis après avoir obtenu une licence en philosophie, je suis entrée aux Beaux-Arts. Durant mes études, nous étions une équipe de quelques étudiant.e.s à avoir monté un petit espace d’art. Je me sentais vraiment à l’aise dans cette position et à la fin de mes études, j’ai postulé au poste de responsable des expositions du centre d’art en l’île. Au fil du temps, la structure et les missions ont été redéfinies, et j’ai pris la direction de Halle Nord. C’est une petite structure et en tant que directrice, je suis multitâches (rire) : la programmation, la planification, les recherches de fonds et de subvention, etc. J’ai aussi initié des projets d’envergure, comme par exemple, la BIG ou encore dernièrement  Art au Centre Genève.

2. Halle Nord a un positionnement particulier. Quel est son engagement sur la scène locale ?

Halle Nord tient une place importante dans le paysage artistique genevois. Il soutient la création locale, avec la volonté de développer un rayonnement suprarégional, voire international. Cela en fait un interlocuteur privilégié auprès de la scène artistique locale, des institutions et des artistes de l’art contemporain. En portant des projets fédérateurs et inclusifs et en développant des partenariats avec des entités hors du milieu culturel et de manières transdisciplinaires, Halle Nord contribue à faire rayonner les artistes contemporains locaux auprès d’un public large et très diversifié. Les expositions annuelles se comptent entre 6 et 10.

Lieu central géographiquement, visible de l’extérieur 24h sur 24h, Halle Nord fonctionne de jour comme de nuit comme une vitrine sur la cité dans un lieu stratégique de circulation piétonne. Il permet de faire partager au plus grand nombre – simple passant, amateur, curieux, touriste mais aussi professionnel et étudiant – la richesse de la création contemporaine de Genève.

2. Laura Thiong-Toye, Salle d’attente, 2020
3. Konstantin Sgourdis, Nepenthes, 2020

3. Comment choisissez-vous les artistes exposé.e.s ?

La programmation se fait au grès des rencontres, de visites d’ateliers ou encore simplement parce que certain.e.s ont osé passer la porte du bureau pour venir me parler de leur travail.

4. Nicolas Fournier & Pauline Julier, Dense Collection Area, 2019

4. Le Musée Ariana possède une riche collection d’environ 28’000 pièces (céramique et verre), visible en partie dans son parcours de référence. Les artistes contemporains sont également présents avec, comme en ce moment deux expositions temporaires du plasticien Alexandre Joly et du verrier Hubert Crevoisier. En quoi l’art nous aide selon vous à comprendre le monde passé, présent et futur ?

Les musées ont pour moi la fonction de conserver un patrimoine et de révéler les évolutions sociales et culturelles dans une chronologie bien définie. Ils font office de lieu de mémoire indispensable pour la bonne construction de notre identité et de notre diversité dans un monde en perpétuelle mutation.

Ainsi quand un artiste contemporain dialogue avec les collections, il change les perceptions des objets dans leur chronologie historique et nous les percevons ainsi dans un statut complétement différent. Le dialogue entre l’art contemporain et les objets issus des collections forment ainsi une nouvelle grille de lecture. Cela permet de créer un lien avec le passé et le présent et aussi de dynamiser les propositions pour découvrir les collections du musée et y poser un nouveau regard.

5. Vous êtes familière avec le travail d’Alexandre Joly pour l’avoir suivi depuis ses débuts. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ? Et sur l’exposition en cours ?

Ce qui me plaît le plus dans les œuvres d’Alexandre c’est la dimension immersive de ses installations. C’est comme si, tout d’un coup, on avait accès à des paysages sonores, sensoriels ou esthétiques.

J’ai une affection particulière pour sa série de travaux « Trames ». Une myriade de haut-parleurs piézos qui diffusent un bourdonnement électrique. Reliées par des cordes de piano, les pastilles de cuivre composent, en fonction de l’espace, des motifs à l’harmonie de ruche.

6. Pour finir, quel conseil pourriez-vous donner à une personne plutôt réfractaire à l’art contemporain ?

Je dirais que le spectateur doit prendre le temps de découvrir, de regarder une œuvre. C’est dans le face à face que le dialogue se construit.

Il est vrai que parfois l’art contemporain est peu accessible et que le spectateur, pour mieux le comprendre, doit disposer d’une base de connaissance même rudimentaire de l’art contemporain pour contextualiser. Mais comme dans tous domaines, cela peut s’acquérir petit à petit.

La médiation est un point très important pour familiariser les publics à l’art contemporain : des textes clairs et accessibles, des rencontres avec les artistes…

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Copyrights :
1. © Isabelle Meister
2. © Laura Thiong-Toye
3-4. © Thomas Maisonnasse
5-6. © Boris Dunand, Musée Ariana

En savoir plus :
www.halle-nord.ch
www.artaucentregeneve.ch
www.ateliersportesouvertes.ch

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Découvrir, apprendre, plonger dans le monde de la céramique et du verre, voilà ce que propose ce blog. Les textes sont signés par des collaborateurs-trices du musée mais aussi par des professionnel-le-s et des amateurs-trices venant parfois d’autres horizons. Tous et toutes prêt-e-s à faire partager leur savoir, chacun pose ici un regard passionné, scientifique et inédit, décalé et amusé parfois.

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